Demain, 24 février, l’invasion de l’Ukraine par les Russes entrera dans sa deuxième « saison », comme on dit en télé.
Depuis 12 mois, chaque jour, les chaînes d’data proceed relaient des photographs de mort, de destruction et d’atrocités. Ces photographs font la manchette de tous les journaux. Les cooks d’antenne, les correspondants et les reporters de Radio-Canada et de TVA font la navette entre Montréal, Kyïv, Kherson et les autres villes d’Ukraine.
Ce n’est pas la première fois que la guerre assiège nos écrans. Depuis le Vietnam, l’Afghanistan et la Syrie, la télévision nous gave d’photographs terribles, mais il s’agit toujours de peuples et de lieux exotiques. L’Ukraine, ce n’est pas pareil. Les maisons, les magasins, les immeubles ressemblent aux nôtres. Les rues et les voitures aussi. Il y a de la neige et un printemps comme chez nous, des églises, des théâtres, un métro et même des abribus. Kyïv, c’est comme Montréal ; Odessa, c’est comme Québec.
Quand je suis allé aux funérailles de la petite Ukrainienne Mariia, renversée par un chauffard à Montréal, en décembre dernier, la fillette que j’ai vue gisant dans son cercueil blanc à l’église Saint-Sophie aurait pu être ma petite fille. J’ai serré son papa et sa maman dans mes bras. Ils avaient l’air de ma parenté. Du coup, la guerre que je vois chaque jour à la télé m’est apparue encore plus proche. Comme si elle se passait chez des voisins.
QUE POUVONS-NOUS FAIRE ?
Le 15 mars 2022, Serge Sasseville, conseiller indépendant de Montréal pour l’arrondissement Ville-Marie, s’est rendu en face du consulat russe, en haut de la rue du Musée. À l’heure du midi, il a fait jouer à tue-tête sur son petit appareil de son l’hymne nationwide d’Ukraine. C’est la façon qu’il venait de trouver pour dénoncer l’invasion.
Petit à petit, d’autres manifestants se sont joints à Serge. Des Ukrainiens comme Igor et Zhenia, comme la Russe Olga, le jogger Patrice, comme Carole, chanteuse à la retraite ayant adopté deux enfants russes, Helen, Nicole, styliste de cinéma, Daniel, qui vient de Laval à vélo presque chaque jour, mon jumeau Claude, sa femme Marie-José et Maryse, ma femme. Ils sont tous des réguliers de cette manif quotidienne. Après avoir fait entendre des bruits de guerre, Serge fait jouer trois fois l’hymne nationwide d’Ukraine et tous crient des slogans anti-guerre en path du consulat.
Cette manif en apparence anodine ne passe pas inaperçue. Elle a déjà fait le tour du monde. Les grands quotidiens de partout ont publié des photographs et plusieurs chaînes de télévision, dont celles d’Ukraine, ont diffusé des reportages. Les messages d’encouragement ont afflué des quatre cash de l’Occident.
ON INSTALLE DES BARBELÉS !
La manif quotidienne entrera bientôt dans sa deuxième saison. Comme la guerre ! Elle perturbe beaucoup les habitants des immeubles cossus du consulat, automobile on a fait installer en haut de l’immense clôture de fer forgé entourant la propriété quatre rangs de fil barbelé. À moins que ce soit pour que le personnel russe expérimente ce qu’est la vie dans un univers concentrationnaire !
De temps à autre, je me rends à la manif moi aussi, mais le cœur me manque lorsque j’entends l’hymne nationwide d’Ukraine. L’hymne redonne vie à toutes les photographs que je vois à télé. La télévision a fait de notre terre un village international, mais il est très mal en level et nous restons bien impuissants à intervenir. Slava Ukraini !